De nuit 140 423

Ce que j’apprends cette nuit, et qui me fait plaisir : Le prix international Formentor de littérature 2023 a été remis, mercredi 12 avril, à Pascal Quignard pour l’ensemble de son œuvre, récompensé « pour la virtuosité avec laquelle il a renoué avec la généalogie de la pensée littéraire, pour le talent avec lequel il se soustrait à la banalité textuelle et pour avoir appréhendé les dimensions les plus inattendues de la création littéraire ». J’ai à peu près tout lu de lui, à peu près ou même souvent intimement. Il est de ces auteurs ‘préférés’ qui accompagnent ma vie.

Il devrait pleuvoir, mais la nuit reste silencieuse. Hier, je suis allée voir si les charançons bleus et autres petits insectes animaient les haies et les arbustes qui bordent bois et champs. Rien encore. L’année dernière ce sont eux qui m’ont remise sur pieds, redonné de l’énergie, ont fait repartir mon souffle alors que lièvres, chevreuils et oiseaux vivaient dans des temps trop rapides pour que je puisse les suivre. Mais les insectes ne sont pas encore là. J’irai voir chaque jour.

Manières d’être vivant, page 135-136, Baptiste Morizot, évoque la possibilité que les loups soient réceptifs à l’idée de prise de contact interspécifique. « Quelle étrange émotion d’être l’objet de la curiosité d’un animal, qui vient vous voir depuis bien loin, dans la nuit pour savoir qui vous êtes, alors même qu’il sait que vous n’êtes pas celui que vous prétendez être, qu’il sait que vous n’êtes ni de la meute, ni même un loup, et pourtant il enquête. Inversion nourrissante : être l’objet de l’enquête d’un fauve. »

L’autre nuit j’ai écrit une courte histoire. Je la voulais réaliste, avant qu’elle ne bifurque sur une vieille histoire, celle de Léonie, la craqueleuse. On se retrouve donc avec une histoire d’ombres et de corps échangés. Cette dévérouilleuse de corps a chamboulé le sens que je voulais donner à une simple rencontre plaisante entre un homme et une femme sur une route du bois. Les personnages n’en font qu’à leur tête. Ça se terminera dans le même centre pénitentiaire qui retient la craqueleuse. Peut-être arriveront-elles à s’évader toutes les deux. Peu m’importe. Je les laisse libre de vivre leurs vies, qu’elles en face autant pour moi.

Frotter les mots les uns contre les autres, espérer faire jaillir quelques chuchotements qui creuseront le silence de la nuit et s’en faire un nid pour les rêves. 5h14, et déjà l’oiseau chante. Il est grand temps de dormir.

4 commentaires sur “De nuit 140 423

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    1. Bonjour Marie-Anne. J’ai découvert Pascal Quignard une vingtaine d’années avec sa Rhétorique spéculative (lecture qui a rendu un voyage en train Paris-Marseille inoubliable). Ce fut une révélation jubilatoire. J’aime beaucoup l’écriture fragmentaire qu’il pratique. Je conseillerais les livres composant Le dernier royaume, en particulier les trois premiers peut-être (mais c’est tellement subjectif), Les ombres errantes, Sur le jadis, Abîmes, La barque silencieuse…. Celui dont l’émotion reste forte en ma mémoire, Les larmes, dont j’avais parlé sur ce blog https://carnetsdevy.com/2018/06/28/les-larmes-pascal-quignard/

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