La boite s’est refermée…

… D’abord les deux abattants latéraux puis le couvercle.

On n’y voit goutte, dirait le chat s’il était moi. Mais ni chat, ni moi dans cette boite.

Boite à chaussures, boite à bonbons, boite à leurres, boite à bonheur, boite flottante.

Boite à sauvetage, les temps sont à l’abîme.

Choc, chute et confusion.

Quelques plumes sur la vitre collées. Juste des plumes. Soulagement. Le sol ne révèle rien sur l’instant, en insistant apparaît le petit corps meurtri tremblant inanimé.

Chardonneret fonceur n’a pas vu le marque-page marque-vitre avertissant du danger.

Petit oiseau exalté passé par dessus bord des frétillements de la vie.

Sur lui la boite s’est refermée. Tapissée de papier doux. Hôpital de fortune, chambre de décompression.

Chardonneret, dit « élégant » du groupe des envahisseurs de mangeoires du lieu dit La Margelle. Grégaires, bagarreurs, gourmands, chassant mésanges, rouges gorges ou pinsons, et eux-mêmes.

Contre la vitre s’est cogné et dans l’obscurité s’est effondré.

Parfois la boite s’ouvre pour vérifier l’état du petit pensionnaire. Il lui faudra deux heures pour reprendre ses esprits. Et se remettre droit. Le voilà qui me regarde de ses petits yeux vifs. C’est donc le grand moment. Petit oiseau sonné peut reprendre sa route. Le soleil se joint à nos encouragements. Mais il ne bouge pas. Non ? Tu veux rester ici ? Une caresse sur la tête, le voilà qui s’échappe dedans le millepertuis, les ailes fonctionnent, les pattes s’accrochent. Le plus joli moment, il reprend son envol et disparaît.

Encore un rescapé. Il est devenu fort rare qu’ils se cognent, les marque-page sont efficaces.

Je change le papier doux souillé de quelques fientes du fond de la boite.

La voici refermée et remise à sa place.

Peut-être alors qu’un chat l’habite à ce moment précis, un chat qui dirait qu’on n’y voit goutte là-dedans. Puisque j’y pense. Puisque je vous le dis.

(sauvetage d’un chardonneret – mars 2023)