Je sortais de ce vaste endroit un peu chaotique que j’appelle le Cirque. L’homme me dit : « C’est assez souvent que les arbres tombent sur les maisons. » J’essaie de contester, l’année dernière, une seule maison a subi la chute d’un arbre, un gros, le toit détruit. L’homme m’en indique une autre, je préfère penser qu’il se trompe, je n’en ai pas entendu parler. Un portail, oui, écrasé, éclaté. Il ajoute : « Mais enfin, beaucoup de maisons sont plus que centenaires, c’est donc qu’elles ont tenu. C’est qu’ils ont bien souffert cet été avec la sécheresse, et puis les pluies diluviennes ensuite, et enfin le gel. » Les maladies aussi. Nous autres habitants du bois sommes amoureux et fatalistes. On ne peut pas penser tout le temps aux arbres qui tombent. On y pense simplement. La vie du bois c’est aussi ça. Je les photographie quand je peux dans leur lente descente vers le sol. Mais pour beaucoup c’est lorsqu’ils sont à terre que je fais leur portrait. Le plus beau, ce fut un châtaignier bien vif qui basculait lentement vers le vide, ses racines soulevant la terre au ralenti, la chute était inexorable. Il a mis plusieurs mois à tomber, plusieurs mois (plus d’un an, deux peut-être) ensuite à mourir parce qu’il était retenu par un congénère. Mais il a fini par se briser sous son propre poids. Les racines en l’air encore prises pour partie dans la terre, il a abrité un nid de guêpe. L’herbe a poussé sur sa base surélevée, des jonquilles, des jacinthes des bois, tout ça à hauteur de nos yeux. Depuis qu’il s’est cassé, avachi dans le grand trou de la doline, il glisse, laissant une béance sur mon sentier. Il ne refera pas de feuilles cette année. Les champignons vont s’occuper de lui. Un autre arbre est en train de basculer à quelques mètres à peine. J’en note les moindres mouvements. Il penche lentement. C’est un énorme « deux-troncs » et lorsqu’il s’effondrera aucun autre arbre ne le retiendra celui-là. Et il emportera nombre de jeunes arbres dans sa chute. Vous imaginez le fouillis, le sentier condamné, la vie perturbée et reconsidérée. Espérons qu’il passera le printemps et l’été. Après les nids, il fera moins de bruit.




Merci ‘vy
d’ainsi nous raconter les arbres…
J’aimeAimé par 2 personnes
ici les grands arbres tombent sous les assauts du vent car leurs racines affleurent et ils ne sont pas ‘ancrés’ …… j’y suis très sensible aussi
la forêt étant dense, ils se soutiennent les uns les autres mais dès qu’il y a une trouée, c’est la bascule assurée pour celui qui se retrouve seul…. la solidarité n’est pas un vain mot chez les arbres
J’aimeAimé par 1 personne
Oui, le vent, les tempêtes ne les épargnent pas. C’est un vieux bois qui vit sa vie et que les résidents respectent en général. (dans un de tes articles tu parlais des premiers signes printaniers, hier je les ai vus aussi ici. Les pousses de jonquilles sortent de terre. Que j’aime ce genre de marque du temps. On recommence et c’est une nouvelle aventure pleine de vie qui s’annonce)
J’aimeAimé par 1 personne
on est synchro! moi ce matin je regardais ces premiers signes vus dans mon jardin et qui n’ont pas du tout évolué depuis car il a fait trop froid depuis 🙂
J’aimeAimé par 1 personne
Et moi, j’attends la première grenouille. Froid ou pas, je tends l’oreille chaque jour au premier brrrroonn de l’année nouvelle. Allez, encore une semaine ?
J’aimeAimé par 1 personne
oui je me souviens que ce sont les grenouilles qui donnent le top chez toi! 😉
J’aimeAimé par 1 personne
Hihi, j’ai tellement hâte de leur retour que je radote 😄
J’aimeAimé par 1 personne
m’heu non!!! 😉
J’aimeAimé par 1 personne
« On ne peut pas penser tout le temps aux arbres qui tombent. » Quelle belle phrase…
J’aimeAimé par 2 personnes
Bonjour, je découvre au fil de mes promenades sur les blogs, ce billet sur les arbres. Je les aime beaucoup ces arbres, ils me parlent, m’apaisent. Un arbre qui tombe, j’en ai entendu le bruit sourd et lourd, la terre en tremble, comme s’il pleurait…
J’aimeAimé par 1 personne
Entendre aussi les arbres qui grincent, comme si une porte s’ouvrait. Et puis les branches qui s’entrechoquent comme un combat de cervidés en plein ciel.
J’aimeAimé par 1 personne