Au début, j’ai connu Teddy sans voix. Je le voyais babiller ouvrant son petit bec, gonflant son plastron, tout en me regardant, et c’était à peine audible. Et puis, le temps passant, il semblait me raconter la vie du bois pendant mes quatre jours d’absence hebdomadaire. C’était tout piano piano, une minuscule petite voix logorrhéique. Il me faisait beaucoup rire. Il avait pris quelques habitudes de me suivre dans le bois, j’entendais d’abord le son du battement de ses ailes et un petit chant tout modulé. Je lui parlais moi aussi d’une voix à la fois douce et joyeuse.
Hier, au jardin, je l’ai suivi des yeux lorsqu’il s’est envolé, de branche en branche il s’est élevé très haut. Et là, j’ai entendu sa voix puissante et belle. Quelle surprise ce fut !
Sans parler de véritable soleil, il y avait de la lumière, aussi je décidais d’aller sur mon sentier essayer mon nouvel objectif. Je m’éloignais des regards, me noyais parmi les arbres qu’il m’arrive souvent de saluer au passage comme des voisins connus. Très vite on y disparait sur mon sentier, et puis on passe la porte des houx, un peu piquant-griffant, je les rassure en les caressant, ce n’est pas grave, et puis le sentier suit le bord d’un cratère, là où un obus a meurtri la terre. Je sais que bientôt sur la gauche s’ouvrira la petite clairière, celle où je me cache parfois en écoutant le bruit des voix passantes de l’autre côté des arbres de bordure. Mais avant de bifurquer je cherche les portes cachées dans la forêt. J’aime m’y faire toute petite, je m’accroupis, je vise, mise au point, j’aime ces flous sur les bords comme des petites fées de lumière, je shoote.
Et là, j’entends. Sur ma gauche, mais où ? « Teddy » ? Il chante. « Teddy, c’est toi ? » Je me relève. Je n’entends plus que son chant, mais d’où vient-il. Le contre-jour m’empêche de voir. « Où es-tu, petit amour ? » Je me déplace, je cherche le nez en l’air, les arbres tournent, il chante.
Je contourne le contre-jour, le prendre à revers et pouvoir voir enfin. « Chante, mon Ted, dis-moi où tu es ». Et il chante, il chante. Et tout là-haut, sur une branche, j’aperçois un petit piaf. Trop petit pour que je vois que c’est Teddy Rouge-Gorge, sauf qu’il est là, ne s’envole pas et que le son vient de lui, c’est maintenant certain.
Dans le viseur, zoom à 300 mm, je le vois. Mon ami qui m’a suivie jusqu’ici encore une fois, toujours un peu plus loin. J’ai l’impression d’avoir pointé un télescope sur un autre monde, mes yeux nus ne peuvent voir mais les lentilles du télé me donnent ce bonheur. Et il chante, et il se tourne vers moi, chante et chante encore. Et je lui parle, et nous prenons possession de cette bulle du bois où nous ne sommes plus que tous les deux…
Il a chanté jusqu’à ce que des voix se fassent entendre de l’autre côté des arbres. Alors il est reparti vers chez nous. J’étais tellement émue que j’ai écourté ma promenade dans le bois, je voulais revoir Teddy sur les clichés, je crois qu’il m’aurait attendu au bout du sentier, près de la maison comme il le fait parfois, s’il n’y avait pas eu cette femme qui ramassait des jonquilles. Peu importe, nous nous sommes revus dans le jardin. Ce petit piaf est un bonheur, une grâce de la vie.
oh quelle merveilleuse aventure, Evy! je n’en suis pas étonnée puisque je t’ai surnommée le p’tit lutin des musées 😉
et que je suis heureuse que le musée du moment soit ton p’tit bois! teddy, cousin du mien d’ici (j’en ai un aussi en provence), devient ton guide à présent 🙂
je pense que le rougegorge est le gardien d’un lieu car j’en ai toujours eu un dans mon jardin (et mes filles en ont un aussi)…jamais deux et c’est une énigme pour moi, même si je sais que c’est leur particularité 😉
est-ce que le chant de teddy ressemble à l’un de ceux enregistrés ici: http://www.oiseaux.net/oiseaux/rougegorge.familier.html?
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J’espère que mon bois deviendra mon musée de tous les moments.
Oui, un seul rouge gorge par jardin, sauf au printemps, il faut bien que les couples se forment. Il y en a un qui vient de temps à autre, ils mangent tous les deux à 50cm l’un de l’autre.
J’ai écouté et je ne sais pas trop dire. Je crois que chaque oiseau à son chant, on reconnait un peu la modulation.
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alors c’est que ton teddy est un ténor avec son propre répertoire, ce qui ne m’étonne pas 🙂
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https://www.youtube.com/watch?v=StDZOJo1x_4 🙂
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Oh, c’est tout mimi.
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Adorable … c’est beau cet échange d’amitié entre vous.
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Je suis tellement touchée par sa confiance. Bien qu’il demande à être toujours à une certaine distance, et je ne cherche pas à réduire cette distance, c’est un petit animal sauvage, il faut qu’il le reste.
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Peut-être qu’il se rapprochera de sa propre initiative …
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Je serais immensément touchée, mais je préfère pas. Lorsque je dépose quelques graines, il approche, sautille et s’éloigne, puis revient très près mais ne mange pas, il sautille encore et s’éloigne, je comprends qu’il veut que je m’éloigne, ce que je fais, un pas en arrière. Là, il mange. Je pourrais l’habituer, ne pas bouger, je suppose que les graines ou cacahuètes finiraient pas être trop tentantes. Mais je préfère pas. S’il baisse ses gardes, il se met en danger vis à vis des chats ou je ne sais quoi.
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Je comprends 🙂
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C’est touchant ‘vy de te suivre ainsi dans ce bois, dans ces amours folles et belles… et ces photos… oui, ces photos… tant des branches noires et belles que de ce piaf tant aimé… ces photos… juste wow. Et puis les fées, ne pas oublier les fées…
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Jamais les oublier les fées, ni les gentilles sorcières non plus.
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Comment ne pas être sous le charme?
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