
« Tu me fais goûter ta galette ? » demande gentiment le loup.
« Tu fais un selfie ? » lui répond Béatrice.
C’est à peu près là que nous en étions. Un frémissement dans les circonvolutions labyrinthiques. Mais où est passée Béatrice ? c’est la question qui se chuchote de feuille en feuille, de marge à marge. Loretta a rassemblé les filles. L’heure est grave. Béatrice a disparu.
– Envolée, enviolée, envoilée.
– Tu sais quelque chose, Corbeau ?
– Croa, la dernière fois que je l’ai vue, elle s’amusait avec le loup. Tout de rouge vêtue. Elle voulait faire un selfie.
– En vert, elle était, gronde le dragon.
– Mettez-vous d’accord, en rouge ou en vert ?
– Pff, vu que Corbeau est daltonien, c’est moi qui ai raison, n’est-il pas ?
– Mais tu dis toujours le contraire de ce que tu penses, Dragon. Bon, les filles, ça devient préoccupant, Béatrice a disparu, je crains pour le loup. Qu’est-ce qu’elle nous a encore fait, cette fois ? On cherche donc une fille peinte en rouge ou vert, fais passer le message, Sophia.
Il fut décidé que Jodhra et Céline fouillerait le labyrinthe. Héloïse étant dans son purgatoire en train de cuver sa dernière tentative de mouricide, inutile de compter sur elle. Sophia devait déficeler l’histoire et tenter de trouver la bonne pelote à démêler.
– Je prends l’Enfer et vous prenez le Paradis, les oiseaux, ordonna Loretta. Corbeau et Dragon, faites ce que vous pouvez de votre côté.
Voilà tout notre petit monde parti. Sophia s’installe à sa table d’écriture et commence à rêver. Trouver la bonne porte d’entrée dans la forêt des mots, elle adore ça, mais il lui faut entrer dans un état second. Béatrice lui a justement rapporté un peu de laitance de barracuda, l’effet devrait être fulgurant.
Pendant ce temps Corbeau et Dragon s’en vont retrouver Béatrice. On s’amuse tellement avec elle, bien sûr qu’on ne va pas la trahir et dévoiler son petit coin secret. Il y a toujours une telle ambiance lorsque Béa est amoureuse. Elle peut tout donner. Tout accepter. Hormis le non respect du droit à l’image. Et Louloup n’avait pas respecté cette clause. De cette nuit fantasmagorique, elle gardait encore quelques cicatrices sur le corps, dont elle était assez fière. De ce charmant petit enfer elle était sortie emportant avec elle un cadeau pour Sophia et quelques désirs d’apprendre à son amoureux la politesse. Ô nuit d’ivresse et de folie qui aurait tant pu la distraire.
Fallait-il qu’elle l’aime pour, à son tour, lui faire visiter son petit monde. Redevenir Chaperon Rouge et lui faire apprécier les jeux de la forêt des Miroirs. Pouvoir tirer la chevillette à son gré, titiller la bobinette, le regarder frissonner, palpiter, s’émoustiller, fragmenter son désir sur les gros plans de son corps, prendre en rafale chaque muscle en bandaison. « Mon cher petit puzzle d’amour, détend-toi, et fais-moi confiance. Je t’aime. »
— Béatrice !!! Je savais qu’en suivant Corbeau et Dragon avec leur air comploteur, je te trouverais. Dis à tes nymphos de relâcher tout de suite ce pauvre Loup !
— Oh non, Loretta, arrête de faire ta fâcheuse, viens plutôt t’amuser avec nous. On ne fait rien de mal. Il était d’accord pour jouer.
— « Etait », oui, mais il ne l’est certainement plus. Regarde dans quel état vous l’avez mis. Il va encore en manquer des bouts. Et retire-lui ce masque de contrition, ça abîme le teint… Mais Béa, c’est quoi cette queue ? Me dis pas que…
— Hé ho, tu me prends pour qui ? C’est juste un jouet… Je ne veux pas abîmer mon amour. Tu as vu les photos que j’ai prises ?
— Oui, pas mal. Je peux te photographier avec lui si tu veux. Vous, les nymphos, remettez-vous en place, Corbeau, arrête de le picorer et prends la pose.
— J’adore quand tu donnes des ordres, Loretta. Je te mets l’appareil en noir et blanc, c’est plus sympa, tu verras. Rafale ?
— Bien sûr ! Ensuite on se fait un banquet avec notre invité d’honneur, qui prendra d’abord un bain d’eau de rose, parce que là, il commence à sentir le fauve.
oh génial
J’aimeJ’aime
Fantastique à souhait et le dessin est ma-gni-fi-que!
J’aimeAimé par 1 personne
Délicieusement divertissant!
J’aimeJ’aime