Ecrire, ou comment l’inspiration vient aux mots

J’ai tant de monde dans la tête que me mettre des contraintes d’écriture ne m’a jamais tentée et plutôt même rebutée. Et puis je suis allée traîner sur un blog qui propose d’écrire sous contrainte chaque jour à partir de neuf mots. Etonnamment je me suis prise au jeu, contrainte libératrice, j’en suis à ma troisième participation aujourd’hui.

Il faut dire aussi que j’y ai vu la possibilité d’ajouter des fragments à l’histoire de Béatrice commencée sur le bocal (petit rappel s’il est besoin en cliquant sur ce lien). Ce que j’ai fait sur mes deux premières participations. Mais sur les mots du jour 28 (parfaits pour Béatrice), c’est Loretta qui s’est imposée, souhaitant évoquer un souvenir de sa vie avec Cyprien. Conciliante, Béa se retirait sans crêpage de neurones et laissait Loretta à ses réminiscences.

Je vous laisse découvrir ce texte ci-dessous, les mots imposés étaient : Entrave, Chuchotement, Empreinte, Sapide, Cyprine, Ventre, Toison, Morsure, Ordre

*

L’âtre crépite avec voracité et les morsures du feu sont presque venues à bout des grosses buches que je lui ai offertes. Et je repense à toi, Cyprien, à l’ordre naturel de tes désirs que tu savais si bien maitriser avant d’en libérer l’incandescence. Dans ces langues rougeoyantes qui dansent et se dévorent entre elles, tout comme autrefois, je nous revois. Avant l’entrelacement de chairs sapides, le festin s’annonçait de qualité et d’élégance, de dépravation et de succulence, un cheminement vers notre combustion, la grâce d’une offrande, toi et moi sur le radeau de l’éternel. Aujourd’hui nos fantômes s’agitent sous les chuchotements de ton absence. Je nous revois, moi debout dénudée d’une fierté amusée te défiant devant la cheminée. Toi, maitre de vie, saigneur ou soigneur, selon les heures. Je les entretiens ces images comme je nourris le feu. Les voix du souvenir sont des entraves au présent quand elles se taisent. Alors oui, j’alimente, j’extrais, je veille sur ce brasier de notre amour qui vrombit, claque, explose. J’exposais, mon ventre, ma gorge, ma docilité fragmentée, j’étais puzzle de chair, toison chaude, croupe bandée prête à bondir. Ce jour je t’invitais à passer à table. Ton regard gourmand quand tu plongeas et retiras tes doigts enivrés de moi, « Tu sens bon, je te garde ». Devant toi le saint-pierre, marqué comme il se doit de l’empreinte du saint, moi en face un verre de Sancerre blanc à la main, je t’observe, tu poses tes couverts et tu portes à ta bouche entre pouce et index la chair blanche et ferme du poisson. Un soupir de ravissement avant de t’exclamer : « Ce saint-pierre au jus de cyprine est un délice. »

*

Si l’aventure vous titille ou simplement la curiosité, le blog s’appelle Ecriture Contrainte

15 commentaires sur “Ecrire, ou comment l’inspiration vient aux mots

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      1. Travailler et avoir un minimum d’imagination… L’histoire littéraire, artistique, et cinématographiques du reste (dans une moindre mesure au niveau artistique, mais plus forte au niveau économique) sont parsemés d’exemples de contraintes ayant donné de grandes œuvres.

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        1. Mais je m’amuse énormément, et puis je crois que ce travail d’écriture me fait progresser. Par contre, je ne trouve plus le temps de dessiner. Et les cubes… Il faut faire tourner 🙂 Et puis, j’apprends plein de mots et je fais des recherches. Difficile pour moi de placer le mot thermodynamique, par exemple, ou lapiez (j’ignorais ce que c’était) pour le texte de demain.

          Aimé par 1 personne

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