Etrangement vivre sur deux lieux (quatre jours ici, trois là-bas) n’a pas nuit à mon travail de création. Bien au contraire, j’ai appris à mieux organiser mon temps, à ne pas remettre au lendemain (fichue procrastination), à faire ici les travaux sur ordinateur, l’impression, les plans, là-bas le dessin, les photos… Pressée par une petite exposition à laquelle je participais, j’ai terminé la mise en forme des textes auxquels je tenais, ils constituent un livre dépliant qui, je l’espère, s’enflera d’autres textes.
Cette année, j’ai construit neuf cubes, neuf cocons dans lesquels des mondes se déploient. Ce peut être des objets personnalisés offerts à des personnes particulières ou des cubes plus intimes ou représentatifs de l’univers qui m’entoure ou m’habite. Quand je compose un cube, il y a d’abord une idée initiale, puis j’y pense tout le temps, mais je dois reconnaître que ça construit dans l’imaginaire plus facilement que ça ne se fait dans la matière. Mes nouveaux cubes sont plus développés que mes premiers essais, et je ne manque pas d’idées pour aller plus loin. Cependant, il faut leur donner du temps. Il m’arrive de les laisser au repos pendant des semaines, voire des mois comme pour le premier sur l’image à agrandir, où figure une inscription en grec, le « Connais-toi toi-même », pourrait être le nom générique du projet que je mène par ailleurs. Se connaître soi-même, cela englobe une meilleure connaissance des autres. C’est un tout et le tout ne peut pas prendre forme définitive. Ce cube contient une multitude de mots s’abstenant de celui de la fin. Fermé, il est un peu comme la boite de Schrödinger, à l’intérieur de laquelle on ne sait si le chat est mort ou vivant, on ne sait comment s’organisent les mots à l’intérieur du cube. C’est le monde du secret. Là où se joue la partie qui nous échappe mais qui influence notre vie irrémédiablement… diablement essentiel. Un concentré d’univers… Qui sait quel big bang se prépare là dedans ? … Que seront les cubes de demain ? Un po’m que j’ai écrit un jour disait que je m’étais réveillée cubique, étant friande de distorsions, nous pouvons envisager que le cubique en question est un état instable.
Le bois, je le préfère en hiver, quand la brume recouvre tout sauf les fils de la vierge qui, pendant très peu de temps, deviennent des liens visibles ployant sous le poids des gouttelettes de rosée. J’aime la nudité des arbres qui livrent leurs blessures mieux qu’en été. Ces sentiers que je prends, où j’apprécie la solitude, d’un côté du bois plus que de l’autre, nous sommes dans une valleuse, parce qu’ici, il y a ces formes sauvages où j’ai cru déceler des bras, des jambes, une croupe, des silhouettes, des fractures, et depuis qu’il m’a semblé y reconnaitre Valentin le Désossé, je suis dans les coulisses d’un Moulin Rouge intemporel. C’est l’abandon aux ruines de l’hiver que je récupère. Un peu fossoyeuse des lumières d’un temps perdu. Je me promène dans le monde miroir de Hans Bellmer dont les poupées me fascinent. Peut-être mon imaginaire déborde-t-il un peu ? Allons donc. Je suis accompagnée par l’invisible, les murmures des divines. Mon bois, je le photographie avec amour, ivresse sereine, appétit, les arbres s’habituent à ma présence, ils savent mon humilité. J’avance dans le labyrinthe de papier, un livre, un chemin de traverse, qui devrait se déployer au fil des ans, et que vous pouvez voir dans le quart à droite en bas de l’image.
Voici les dessins d’une année, je veux croire que je progresse, mais je ne suis pas encore assez à l’aise pour faire ce que je souhaite. Ma pensée est trop rapide et mon coup de crayon trop long à l’exprimer. On va dire, ça avance. Je sens toutefois que mon style est encore très fragile. Je compte beaucoup trop sur la spontanéité, un peu comme lorsque j’écris. Et parfois surgit la peur du vide… La lecture est un bon remède. Je vous souhaite à tous une douce fin d’année.
Un tout doux bout d’an à toi également, ‘vy. Ce que je crois : C’est quand mon corps s’exprime que je ressens le mieux le dessin. Et ça part dans des directions que je n’avais pas (pré-)vues. La domination de la pensée réflexive donne parfois des résultats intéressants … mais c’est pas souvent ! Dessiner est tout ce qui compte, pour moi. J’accepte le dessin raté ou qui manque ce que j’y voyais. J’accepte même pas de dessin du tout. Il y en aura un autre demain. Quant à vivre trois semaines à un endroit puis une semaine à un autre, j’en suis fort fatigué et vois avec contentement que ce sera fini dans 10 mois. Bises, bravo, et une toute belle continuation à toi.
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Merci pour ce témoignage, Gilles. Pour moi, les trois jours au bois et les quatre au bord de Paris, ça ne fait que commencer. Mais je ne m’en plains pas même si c’est toujours avec regret que je quitte le bois. Je trouve même ça vivifiant à vrai dire. Mais bon, je crois que je me fais à tout au final, tant qu’il n’y a pas d’ennui. Belle continuation à toi aussi.
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Des travaux et des chantiers magi-fiques, voilà ce que je vois! Bravo Evy et que cette fin d’année te soit douce 🌹
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Bravo ! Belle créativité !
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« Le bois, je le préfère en hiver… J’aime la nudité des arbres qui livrent leurs blessures mieux qu’en été. »
« Je suis accompagnée par l’invisible, les murmures des divines. Mon bois, je le photographie avec amour, ivresse sereine, appétit, les arbres s’habituent à ma présence, ils savent mon humilité. »
Merci, ‘vy. Et douce fin d’année à toi aussi. Dans l’ivresse sereine.
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Que c’est beau ‘vy! Je suis particulièrement attirée par les cubes, ces multiples de vous.
Belle fin d’année.
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Ce qui me fait plaisir.
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Je vous souhaite une belle fin d’année, heureuses fêtes ! Vous avez une créativité foisonnante et un beau sens artistique !
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Merci Marie-Anne.
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C’est remarquable, ‘Vy, particulièrement ces cubes gorgés d’expressivité, de sensibilité, qui recèlent un univers palpitant. Meilleurs vœux à toi et aux tiens !
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Merci. Tous mes voeux à toi et ta famille, également.
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Moi j’adore ces histoires de cubes !!! J’espère qu’il y en aura d’autres !
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Certainement, oui.
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